A Lake Geneva, Gary Gygax organise la première Gen
Con tout seul. Il n'y eut que 50
participants ayant payé leur place (1$ par personne) mais cela a
suffit pour s'acquitter de la location de la salle, et Gygax paie
le reste des frais de sa propre poche.
Des joueurs viennent de Milwaukee et de Chicago et jouent tout un
week-end. Il est décidé de se retrouver l'année suivante, en
orgnanisant une vraie convention avec des joueurs venant de tout
le pays.
La Convention de Genève (Gen Con : Geneva Convention) tient son nom de la ville où elle a lieu, Lake Geneva, mais aussi en référence au fameux accord international concernant les prisonniers de guerre et les soldats blessés, signé à Genève (Suisse) le 24 août 1864 sur l'initiative de la Croix-Rouge.
A Minneapolis / Saint Paul, Minnesota, un autre groupe très important de joueurs enthousiastes existe : la Midwest Military Simulation Association (MMSA) composée entre autres de :
Ce groupe commence à expérimenter de nouvelles façons de
jouer grâce à l'originalité de Dave Wesely. Ce dernier, avec
Arneson, utilise déjà le concept d'arbitre introduit dans le
jeu Strategos de Totten.
Dans leur groupe, le rôle d'arbitre est tenu à tour de rôle
pour que chacun puisse jouer en alternance.
Cette année, Wesely crée le scénario d'une bataille
centrée autour d'une ville prussienne fictive : Braunstein.
Ce scénario devait être joué avec des figurines et les règles
d'un wargame napoléonien.
Un plateau de jeu élaboré fut préparé avec une rivière
coulant près de la ville et une université située sur une
colline toute proche.
Cependant, Wesely avait quelque chose de nouveau en tête : au
lieu de commencer tout de suite par une bataille rangée,
Français contre Prussiens, il avait concocté une sorte de
scénario " préliminaire " dans lequel chaque joueur
assumerait le rôle de divers personnages impliqués dans
l'affaire. Au fur et à mesure que les joueurs arrivaient, ils
furent instruits, en secret, du rôle à assumer : le chef de
telle ou telle faction. Avec cela, ils avaient chacun des
objectifs particuliers, et peu de ces objectifs avaient à voir
avec du combat ou de la conquête de territoire.
Par exemple, un joueur reçut le rôle du chef de la garnison
prussienne locale ; son objectif était de trouver tous les
moyens pour défendre la ville. Un autre représentait
l'éclaireur des forces française ; il devait découvrir la
faille du système de défense de la ville. Un autre était le
Maire de Braunstein qui ne devait penser qu'à la survie de sa
ville. Les choses devinrent intéressantes quand certains joueurs
endossèrent le rôle d'étudiants de l'université proche avec
des vues radicales...
En principe, cela aurait dû rester un jeu de figurines : chaque joueur devait déplacer sa figurine quand son tour était arrivé et donner ses ordres à l'arbitre (Wesely) au moment approprié : ils n'étaient pas censé faire quoi que ce soit à moins que leur figurine n'ait été déplacée sur un lieu donné.
En pratique rien ne s'est passé comme prévu : d'une part, plus de joueurs qu'on s'y attendait se sont présentés pour la partie ; Wesely a du leur confectionner des rôles à brûle-pourpoint en improvisant (ne voulant pas les éconduire mais au contraire tentant de les intégrer), ce qui lui a déséquilibré toutes les conditions de victoire de son scénario à la volée. D'autre part, Wesely n'a pas tenu compte de l'imagination fertile et de l'enthousiasme de ses joueurs. Ces derniers furent, en effet, immédiatement enchantés à l'idée de jouer un rôle particulier avec des buts précis et secrets. Après quelques minutes de jeu (en fait, avant même que la partie ait commencé), les joueurs étaient éparpillés aux quatre coins de la maison, conspirant et négociant entre eux.
Quand Wesely eut vent de ce qui se passait, il essaya d'y mettre un peu d'ordre. Des gens venaient lui demander des choses en dehors de leur tour, quand il leur demanda comment il était possible que l'étudiant soit en communication avec l'éclaireur français alors que la figurine de ce dernier était toujours en ville, le joueur répondit en haussant les épaules : " On n'a qu'à dire que j'ai traversé la rivière à la nage et que j'en suis sorti, OK ? ". Wesely ne voulait contrarier personne mais plutôt que chacun s'amuse le mieux qu'il pût.
De même, quand le joueur du Prussien et le joueur du Français vinrent voir Wesely en disant : " Son personnage m'a défié en duel, nous voulons un duel au pistolet ", notre arbitre fut obligé d'inventer une règle de duel sur le champ. Il indiqua à ses joueurs de lancer un dé en pré-déterminant les résultats du duel : sauf, touché ou tué. L'un fut blessé, le rescapé fut envoyé en prison...
A l'aube, aucune conclusion n'était en vue. Le chaos le plus total régnait et Wesely, sérieusement abattu, s'excusa pour l'échec complet du jeu. Mais les joueurs ne le voyaient pas comme cela : ils s'étaient éclatés et voulaient recommencer au plus tôt. Ainsi s'acheva probablement la véritable première partie de jeu de rôle du monde !
Après son retour des vacances de Thanksgiving, le 22 novembre
1967, les amis de Wesely le supplièrent de leur faire jouer un
nouveau Braunstein.
Deuxième session : Wesely la voulait plus stricte. Avec trop de
restrictions, les joueurs détestèrent.
Troisième session : idem, les joueurs voulaient revenir à la
première fois.
Réalisant enfin ce que désiraient les joueurs, Wesely imagina
un tout nouveau scénario sur un sujet qu'il avait étudié
récemment : les coups d'Etat en Amérique Latine. Dans une
République bananière, les participants jouaient le rôle des
leaders de l'Armée, de la Marine, de l'Armée de l'air, de la
Police secrète et des groupes de guérilla.
Peu après, Wesely est appelé sous les drapeaux et Arneson,
son partenaire d'arbitrage et l'un des plus forts soutiens des
séances de Braunstein, reprend le flambeau et continue
à faire tourner les parties de jeux.
Arneson développe de nouvelles idées et tient Wesely au courant
par courrier.